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Monument OPEX - Dessin preparatoire Manon Bériot - Stéphane Vigny - Paris 15

Premières esquisses du Monument OPEX par son créateur Stéphane Vigny

Il se dit « très honoré » d’avoir été choisi pour la réalisation du Mémorial dédié aux soldats morts pour la France au cours d’Opérations Extérieures, les OPEX, qui sera érigé dans le parc André Citroën. Alors que le début des travaux vient d’être inauguré, Stéphane Vigny nous livre les premières esquisses du monument, avec ces dessins préparatoires de l’œuvre principale. La sculpture représentera la cérémonie du « portage » par 6 militaires, lors de l’hommage rendu au défunt.

Comment avez-vous pensé ce monument ?

J’ai eu l’idée tout de suite. Je voulais créer une œuvre sensible, un hommage tourné vers ceux qui restent. Cette idée est très simple. Il n’y a pas de cercueil, car ils portent une absence. C’est elle qui unit les six porteurs ensemble. Ce vide les rend solidaire.

J’ai gardé à l’esprit de m’adresser au plus grand nombre avec cette pièce. J’ai vraiment été vers la figuration et le réalisme, vers une scène très évocatrice, même si cette absence du cercueil est un peu une dérogation au principe de réalité. Cette image est compréhensible par tous car si ce rituel concerne ici l’armée, il est d’usage dans l’ensemble des catégories de la population.

J’ai voulu montrer le côté sensible, l’émotion, qui est très important dans l’univers militaire. C’est un hommage à l’hommage. J’ai eu des remarques du type « Vous représenter la fin, ce n’est quand même pas très glorieux. » Oui mais je ne fais pas d’hommage à la guerre, je rends un hommage aux victimes.

Mais finalement, la sculpture est secondaire. Ce qui comptera, pour les gens qui viendront, ce sera de lire le nom de leur fils, de leur père, ou de leur compagnon,… gravé sur les plaques du Mémorial.

Stéphane Vigny
Stéphane Vigny

A quoi ressemblera ce Mémorial ?

Pour le monument, parmi les 6 porteurs, il y aura une femme et un homme de type africain, qui à lui seul représentera la diversité de l’armée. Je trouvais important que les femmes soient représentées. D’ailleurs le nom du jardin qui accueillera le Mémorial porte le nom d’Eugénie Djendi* ce qui est déjà une référence.

La sculpture ne peut pas figurer uniquement des légionnaires, comme sur le dessin préparatoire, même si j’aimais bien leur képi sur un plan artistique. Pour que tous les corps de l’armée soient représentés, on a été obligé de trouver une tenue adéquate. Les soldats porteront des treillis avec des rangers et un béret.

Le jardin sera restructuré pour intégrer le Mémorial. Actuellement situé en contrebas, il sera surélevé pour mieux s’adapter au parcours de la cérémonie. Les 564 noms seront gravés sur des plaques en laiton. Il fallait prévoir des espaces vides, ce qui n’est pas une perspective très réjouissante, pour facilement ajouter des noms sur les théâtres d’opérations en cours, les nouveaux ou ceux qui peuvent être ré-ouverts.

Il y a un Mémorial aux Etats-Unis, où l’on voit les vétérans se mettre à genoux pour lire les noms sur le mur. On a fait très attention à cela. Le lieu sera accessible aux personnes en fauteuil roulant et aux malvoyants.

Monument OPEX - Dessin preparatoire - Manon Bériot - Stéphane Vigny - Paris 15
Dessin préparatoire de Manon Bériot © Stéphane Vigny

Pourquoi avoir participé à ce concours ?

Comme tout le monde, j’observais les cérémonies aux Invalides. Je ne savais pas trop ce que ça voulait dire, les OPEX. Il a fallu que je me renseigne beaucoup. J’ai appris qu’il y avait 17 théâtres d’opérations extérieures, avec un certain nombre de morts. C’est un sujet très important. Même si mon travail, d’ordinaire, est plutôt du registre du léger et de l’humour, il n’est pas dit que derrière je ne sois pas préoccupé par la vie, par l’histoire de la mort aussi.

Après coup, je me suis dit que c’était étrange qu’il n’y ait pas une reconnaissance de la Nation pour ces hommes. On crée aussi un peu pour lutter contre ça, contre l’oubli. Je pense que c’est important de se rappeler.

Je suis très content de créer une pièce destinée à l’espace public. J’en avais déjà réalisé mais pas de cette nature-là, de cette ampleur, de cette charge symbolique très forte. Je suis très honoré.

* La sous-lieutenante Eugénie-Malika Djendi (1923-1945), dite la « Merlinette », est une opératrice radio du Corps Féminin de Transmission d’Afrique du Nord, parachutée par les Services spéciaux d’Alger, résistante, déportée et exécutée à Ravensbrück.

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Anne-Marie Leca

Journaliste, créatrice de Valgirardin.fr, Anne-Marie vit et travaille dans le 15ème arrondissement depuis plus de vingt ans.
Membre de la Société Historique et Archéologique du 15e.

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