La dernière planque du résistant et militant communiste Joseph Epstein, avant qu’il ne soit fusillé au Mont-Valérien le 11 avril 1944, se trouvait dans le 15ème arrondissement, au 2 rue Labrouste. Né en Pologne, il était à la tête des Francs-tireurs et partisans (FTP) de la région parisienne, sous le pseudonyme du Colonel Gilles. La Ville de Paris a honoré la mémoire de Joseph Epstein, le jeudi 25 octobre 2018, en apposant une plaque commémorative sur la façade de l’immeuble où il se cachait, en présence de son fils Georges Duffau-Epstein. Rencontre…
Vous êtes heureux de cet hommage rendu à votre père ?
Je suis fier et heureux car c’est un peu un aboutissement. Mon père était un immigré polonais qui avait choisi la France comme terre d’exil. Il combattait pour la liberté quelque soit l’endroit où il était : en Pologne, ensuite en Espagne, et pour finir en France, où il a donné sa vie pour notre liberté.
Je suis très fier de son action, qu’il a réalisée sans arrières pensées. Je me souviens toujours des paroles de ma mère quand je lui posais des questions, quand je lui demandais « mais qu’avez-vous fait ? », puisqu’elle aussi avait été résistante. La seule réponse que j’ai obtenue est « mais on n’a rien fait de spécial, nous n’étions pas des héros, nous n’avons fait que ce que nous estimions juste. » C’est tout ce que j’ai réussi à savoir. Après, j’ai appris beaucoup de choses dans les livres, car on parlait beaucoup de mon père dans certains d’entre eux. Moi qui suis Français de naissance, je suis très fier que mon pays lui rende hommage.
Comment grandit-on avec une figure paternelle comme celle-ci ?
On grandit avec une image complètement déformée. Si ma mère ne m’en parlait pas, j’avais, par contre, l’occasion de me rendre compte que mon père était quelqu’un d’important dans différentes circonstances. A la Libération, beaucoup de cérémonies commémoratives étaient organisées. Et moi, petit bonhomme de 6/7 ans, j’étais toujours invité pour aller remettre les fleurs aux artistes qui intervenaient dans ces cérémonies.
Pour moi, c’était un Héros avec un grand H. J’exagère un peu, mais il était presque un demi-dieu. Il était sur un piédestal. J’ai grandi avec cet homme, dont je ne portais pas le nom. Je n’ai eu l’autorisation de porter ce double-nom qu’en 2008.
En 2007, j’ai travaillé avec Pascal Convert sur la biographie* et le film**. C’est quelque chose d’extraordinaire car depuis j’ai un vrai père ! J’ai rencontré des témoins de l’époque, des gens qui l’ont connu. Ils m’ont parlé de l’homme, pas du résistant, l’homme qui aimait la vie, s’amuser, faire des blagues. Un homme normal.
C’est quand même formidable car cela m’est arrivé à 65 ans. Maintenant, j’ai l’impression d’avoir un père comme tout le monde, qui a eu une chair, qui n’est pas cet être désincarné que j’avais imaginé gamin.
En septembre dernier, Georges Duffau-Epstein a confié ses archives personnelles au Musée de la Résistance nationale de Champigny-sur-Marne, qui devraient être exposées dans le nouvel espace Aimé Césaire, dont l’ouverture est prévue en 2019.
A Paris, une place porte le nom de Joseph Epstein dans le 20ème arrondissement, inaugurée en 2005.
**Film : Joseph Epstein, bon pour la légende de Pascal Convert, produit par Sodapéraga pour Arte France (2009)
A lire aussi :
Ajouter un commentaire