Porte de Versailles en 1913 ! De nos jours, seule demeure la grande voie menant vers la rue de Vaugirard. Nous y découvrons, sur la droite, un tramway de l’une des trois lignes qui reliait Paris à Issy.
Mais l’édifice le plus frappant de la photographie est évidemment l’enceinte de Thiers, avec ses bastions, ses murailles et son fossé. Cette ultime muraille parisienne fut édifiée de 1841 à 1844, par Adolphe Thiers, alors président du Conseil. La raison d’une telle construction remonte à l’invasion de Paris en 1814 par les troupes coalisées contre Napoléon.
Un dispositif fort impressionnant
Pour éviter qu’un désastre similaire ne se reproduise, Louis-Philippe souhaitait bâtir des fortifications autours de Paris et de sa banlieue proche. En ces temps troublés, cette construction pouvait également contenir les insurgés si la capitale se révoltait. L’enceinte de Thiers protégeait-elle Paris d’une invasion étrangère ou le pouvoir en place de l’ire des Parisiens ?
S’étendant sur 34km, il est vrai que le dispositif enlaçait intégralement Paris et sa proche banlieue. Les fortifications se composaient de 95 bastions agencés à intervalles réguliers. Une caserne occupait le renfoncement de chacun de ces fortins. Un fossé sec de 40 mètres, 17 portes et des forts détachés, dont certains parsèment encore la banlieue, complétaient l’ensemble défensif.
Le paysage des communes autours de Paris
Quand l’enceinte de Thiers fut édifiée en 1844, elle englobait les villages autour de la capitale, dont ceux de Vaugirard et de Grenelle, rattachés à Paris en 1860. Quant à la cité de Paris, moins étendue qu’aujourd’hui, elle demeurait enlacée par le mur des fermiers généraux. Cette muraille du XVIIIème siècle ne détenait pas une fonction défensive, mais servait à prélever des taxes sur les marchandises qui entrèrent dans la ville par ses barrières.
De 1844 à 1860, les bourgs alentours se retrouvèrent ainsi imbriqués entre le mur des fermiers généraux et l’enceinte de Thiers. La petite ceinture constituait un autre élément du paysage de ces agglomérations. Ce chemin de fer, faisant également le tour de la périphérie parisienne, ravitaillait les bastions des « fortifs », ainsi que fut familièrement nommée l’enceinte de Thiers.
Pas si fort
Ce dispositif se révéla-t-il efficace en temps de guerre ? En 1870, les armées de Bismarck assiègent la capitale. Hélas, l’enceinte de Thiers se révèle obsolète face à l’artillerie prussienne à la pointe de la technologie.
En effet, l’artillerie de siège disposée dans les « fortifs » détenait une portée bien inférieure à celle des canons Krupp. Les belliqueux teutons purent ainsi encercler la capitale malgré la défense française. De plus, l’enceinte de Thiers, en partie délaissée, était peu entretenue. Les généraux français tentèrent de redresser dans l’urgence ce réseau défensif.
Des « fortifs » à « la zone »
Suite à la défaite française, la Commune se met en place au sein de la capitale. Lors de l’assaut de la ville, les canons des Versaillais pilonnent avec véhémence la section de l’enceinte de Grenelle à Passy. Après ces évènements, le gouvernement constate que « les fortifs » sont à la fois obsolètes en cas d’attaque et peut-être même dangereuses en cas de révolte des Parisiens. L’enceinte de Thiers est d’abord délaissée, puis progressivement détruite à partir de 1919.
A l’avant de ces fortifications, s’étendaient la contrescarpe et le glacis. Aucune construction, pas même un arbre, ne pouvait y prendre place afin d’offrir un champ de tir optimal. Cette morne plaine fut alors occupée par des bidonvilles, graduellement remplacés par des logements sociaux plus décents.
L’héritage des fortifs
C’est ainsi que la périphérie du XVème arrondissement se trouva occupée par des habitations à loyer modéré, conséquence indirecte de l’édification de l’enceinte de Thiers.
Mais cette fortification nous a également légué le nom des différentes portes entourant Paris, ainsi que quelques vestiges, dont certains dans le XVème arrondissement ! Le square du Cardinal Verdier, au 1, rue Thureau-Dangin, comprend une pompe à bras dont nous pouvons encore observer le mécanisme. Juste à côté, se dresse l’ancienne caserne du bastion n°73.
D’une manière beaucoup plus hasardeuse, un mur à angle droit dans les fourrés de ce parc constituerait peut-être, mais sans pouvoir l’affirmer, un fragment du bastion n°73. Toujours dans le domaine des hypothèses, la dénivellation de la Porte de la Plaine et du square éponyme serait-il dû à l’ancien glacis ?
Crédit visuel (première photo) : Fortification de la porte de Versailles, 1913, Agence Rol
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